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Depuis leur découverte en 1991 par Luis Jaime Castillo et Christopher Donnan, les tombes des Prêtresses de San José de Moro ont fait l’objet d’une admiration mondiale et d’une intense effervescence scientifique, liée à leur incroyable richesse et leur grande complexité. De la même manière que pour le Seigneur de Sipán, ces magnifiques tombes de femmes ont été une source d’information privilégiée pour parvenir à avoir une connaissance détaillée des aspects les plus intimes et complexes du monde rituel des Mochicas.
Deux des tombes à chambre funéraire découvertes entre 1991 et 1992 contenaient les restes de femmes enterrées avec des tenues et des ornements similaires à ceux portés par le personnage féminin présentant une coupe qui apparaît dans la Cérémonie du Sacrifice et de Présentation. Cette cérémonie est composée tout d’abord par un rituel complexe de sacrifices humains de guerriers mochicas vaincus lors des combats rituels et ensuite par l’offrande du sang des sacrifiés à un « Dieu Suprême ».
Les femmes découvertes à SJM ont été enterrées avec les « Coupes du Sacrifice » et les coiffes singulières en forme d’aigrette, que l’on retrouve aussi dans les représentations iconographiques de l’art mochica. L’importance et la prééminence de leur participation lors des rituels religieux de leur communauté se reflètent dans l’effort important requis pour construire leur tombe, dans la richesse des offrandes et dans la complexité des cérémonies funèbres réalisées en leur honneur.
Les chambres funéraires se composent d’une large fosse quadrangulaire de profondeur variable, mais qui dépassent toujours les trois mètres. A l’intérieur de cette fosse, a été construite une pièce ou chambre possédant des parois en adobes où sont encastrées des niches. L’intérieur de ces contextes funéraires semble avoir été divisé en deux parties : une antichambre située directement sous la fosse d’entrée et la chambre funéraire proprement dite, où le cercueil de l’individu principal a été déposé avec ses offrandes et, dans quelques cas, des inhumations additionnelles.
Le trousseau funéraire découvert dans ces tombes est composé de pièces fines de céramique, de colliers de perles de différentes couleurs, d’objets en métal, en os, etc. Les Prêtresses étaient placées à l’intérieur de cercueils de forme rectangulaire faits de tiges de roseaux, dont les côtés ont été ornés de plaques de métal aux motifs anthropomorphes.
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- La tombe M-U41, la Première Prêtresse. Il s’agit d’une tombe à chambre funéraire dont l’individu principal est une femme (30-40 ans environ) parée des mêmes éléments que ceux portés par le personnage féminin de l’iconographie mochica, connue comme la Prêtresse. Des plaques de métal représentant des jambes et des bras ont ensuite été placées sur les côtés, ainsi qu’un masque comportant une coiffe sur la partie frontale. Avec elle, ont été enterrées cinq autres individus féminins tout autour du cercueil principal. La structure de la chambre funéraire est divisée en deux parties : la chambre et, sur le côté nord, l’antichambre funéraire. Trois des quatre parois de la chambre présentent des niches. Il y a au total seize niches, ce qui est le plus grand nombre de niches rencontré dans une seule chambre funéraire. Le trousseau funéraire est composé de plusieurs colliers de Spondylus, d’objets en métal et de céramiques de différents styles. En plus des vases Ligne Fine mochicas, on note la présence de vases de styles étrangers comme les styles Nieveria et Cajamarca.
- La tombe M-U103, la Prêtresse Enfant. L’individu principal de cette chambre funéraire est très probablement une petite fille (d’après le matériel associé) ayant entre 5 et 7 ans au moment de sa mort. D’autres individus ont été inhumés autour de l’individu principal : deux petites filles, deux petits garçons et deux jeunes femmes. La chambre présente une structure rectangulaire et compte dix niches réparties sur trois murs. Dans trois de ces niches ont été trouvées des maquettes représentant des structures architecturales en très mauvais état de conservation et entourées de céramiques très fines. Les objets en métal (le masque et les éléments de la coiffe) ont été retrouvés sous forme d’agglomérat au sud du cercueil, ce qui peut indiquer qu’ils ont été déformés avant d’être déposés. Ces objets portent des motifs représentant des barques en totora (roseau), représentation commune dans l’iconographie de cette période. Sur certains de ces ornements sont présents des motifs de têtes possédant des dents de félin en relief.
- La tombe M-U103, la Jeune Prêtresse. C’est une tombe à chambre funéraire rectangulaire divisée en deux parties : la chambre au sud et l’antichambre au nord. On compte en tout douze niches réparties sur trois des murs, dans lesquelles avaient été placées des vases Ligne Fine. L’individu principal est une femme entre 20 et 25 ans, entourée par neuf autres individus. La jeune femme a été placée à l’intérieur d’un cercueil de tiges de roseaux couvert de disques de cuivre. Des plaques de métal en forme de jambes et de bras ont ensuite été placées sur les côtés, ainsi qu’un masque sur la partie frontale. On note aussi la présence remarquable des vases Ligne Fine décorés du thème de l’Enterrement et de la Prêtresse sur la Barque.
- La tombe M-U1525, la Dernière Prêtresse Mochica. Ce contexte funéraire est un des plus singuliers puisqu’il correspond à la transition entre la tradition de tombe à chambre funéraire de la période Mochica Tardif et les tombes à chambre funéraire du Transitionnel. Il s’agit d’une chambre orientée ouest-est, avec une entrée dirigée vers l’ouest. La structure a une forme rectangulaire et présente dix niches réparties sur trois des quatre murs de la chambre, ainsi qu’une banquette séparant l’intérieur de la tombe en deux niveaux. Parmi les ornements les plus représentatifs présents dans cette tombe se trouvaient une coupe en métal, une coiffe en forme d’aigrette, des plaques de métal appliquées sur un des deux cercueils retrouvés, deux masques en métal, neuf maquettes en terre crue peintes, deux vases de type « gourde » décorés d’un félin ailé, ainsi qu’un grand nombre de pièces associées à différents styles céramiques qui arrivent à San José de Moro à la fin de la période Mochica Tardif. Il s’agit probablement de la dernière Prêtresse Mochica, enterrée durant une période connaissant de profondes transformations vis-à-vis du fonctionnement social et politique de San José de Moro et la vallée de Jequetepeque.
Cependant, la tradition des prêtresses n’a pas été un phénomène réservé à la période mochica. En effet, ces dernières années des tombes de femmes portant les attributs de prêtresse et datées du Transitionnel ont été découvertes. Parmi les plus importantes, on note :
- La tombe M-U1045, la Prêtresse du Transitionnel. Il s’agit d’une tombe à chambre funéraire rectangulaire avec des banquettes latérales et un accès orienté vers le nord. Ses parois présentaient des niches dans lesquelles a été retrouvée une grande quantité d’objets, dont des maquettes, des céramiques de différents styles, des os de camélidés, des crisoles, ainsi que d’autres objets utilisés lors des rituels. Les individus principaux sont deux femmes et un enfant placés dans des cercueils placés sur le sol de la tombe. En association à ces cercueils se trouvaient deux jeunes hommes et un contenant quadrangulaire où quatre enfants ainsi que les membres inférieurs de trois individus adultes ont été déposés.
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- La tombe M-U1242, la Prêtresse « Absente ». C’est la plus grande tombe à chambre funéraire trouvée sur le site de SJM. Elle est composée de murs en adobes présentant des niches et se divise en trois parties : la chambre funéraire, l’antichambre à l’est et l’annexe à l’ouest. Dans l’antichambre, qui correspond au niveau le plus profond de la tombe, ont été déposés plus de dix individus assis ou allongés sur le sol. Plusieurs céramiques de forme et de type différents ont été placées avec ces individus. La majorité des objets déposés comme offrande a été trouvée aussi bien dans l’annexe que dans l’antichambre, alors que les maquettes et les céramiques fines associées aux traditions Cajamarca, Huari et proto-Lambayeque se trouvaient dans les niches. La chambre funéraire contenait les restes d’un cercueil rectangulaire décoré de plaques de métal ayant la forme de vague et de méandre. D’autres plaques ont été perforées afin de représenter une femme parée d’une jupe, avec les cheveux tressés, une coiffe composée de plumes aux bords dentelés, et portant une coupe dans sa main. Cependant, le cercueil était vide, l’individu ayant été enlevé et le couvercle du cercueil orné de plaques de métal présentant la silhouette de la Prêtresse, était appuyé contre le mur de la chambre funéraire.
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- La tombe M-U615, le mausolée collectif des Prêtresses. Son caractère multiple en fait un contexte très particulier. Il s’agit d’une structure quadrangulaire souterraine dont l’accès est situé du côté nord-est. L’intérieur de la chambre funéraire est divisé grâce à trois banquettes, la première étant dans la zone sud de la tombe et les deux autres, plus petites, dans les angles nord-est et nord-ouest. Pendant les fouilles on a pu enregistrer jusqu’à quatre niveaux de déposition, chacun comportant un nombre variable d’objets (208 céramiques au total), et environ 58 individus des deux sexes et d’âges différents. Les associations funéraires sont très variées : céramiques, colliers et bracelets en perles, boucles d’oreilles en coquillage ou en pierre, fusaïoles en pierre ou en métal, objets en cuivre, masques, coiffes, coupes, couteaux et plaques de formes variées associés à deux individus féminins qui ont pu endosser le rôle de Prêtresse.
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